Compte-rendu du Forum 2040
Séance thématique sur l’impact de la Vision 2040 en termes de bruit au sol, de qualité de l’air et d’impact sur l’aménagement du territoire
La troisième session du Forum 2040 a permis de poursuivre les discussions autour de l’impact des différentes options proposées par Brussels Airport Company dans le cadre de la Vision stratégique 2040. Cette troisième session s’est concentrée sur les impacts au niveau de la qualité de l’air, du bruit au sol et de l’impact sur l’aménagement du territoire.
En introduction, le président a d’abord expliqué que deux participants avaient fait parvenir leurs remarques concernant le compte-rendu de la session du 25 octobre. L’importance d’étudier une troisième option pour le développement de l’aéroport a été soulignée, ce qui impliquerait un autre modèle d’organisation de Brussels Airport Company afin de tenir compte des limites en termes du contexte territorial actuel. Des critiques ont également été formulées par rapport à la méthode utilisée par To70 pour calculer les personnes fortement impactées par le bruit des avions ainsi que les critères Lden. Le président a répondu qu’il avait pris acte de ces éléments et qu’ils ont été communiqués à la direction de Brussels Airport Company.
Ensuite, Piet Demunter, Director Strategic Development chez Brussels Airport Company, a expliqué les initiatives que l’aéroport a déjà prises au cours de ces dernières années pour atténuer l’impact de ses activités dans ces différentes matières. Les participants ont ainsi pu recevoir des explications sur les mesures qui ont déjà été prises afin notamment de limiter le bruit au sol et limiter les émissions,...
Quatre experts sont venus partager avec les membres du Forum 2040 les résultats des études qu’ils ont réalisés en termes de bruit au sol, de qualité de l’air et d’impact sur l’aménagement du territoire.
Afin de répondre aux remarques qui avaient été formulées par certains participants lors de la session précédente, toutes les personnes présentes ont reçu une copie papier des présentations dès l’entame de la session.
Les experts suivants ont présenté leurs résultats :
- Johan Versieren (Tractebel) et Jan Peters (VITO) pour la qualité de l’air et la problématique des particules ultrafines
- Christ Glorieux (KU Leuven) pour l’impact en termes de bruit au sol
- Bart Antheunis (Arcadis) pour l’impact en termes d’aménagement du territoire
Comme lors des précédentes sessions, les participants ont été répartis en trois groupes pour poursuivre leurs discussions sur le contenu des présentations. Les différents experts, de même que M. Demunter et le président Lode Willems, se sont rendus successivement dans chacun de ces groupes et y ont répondu aux questions des participants.
Suggestions et réflexions concernant la qualité de l’air
De manière générale, on a pu constater que les avis divergent quant à l’impact des particules ultrafines (PUF) sur la santé. D’un côté, les risques des PUF pour la santé ont été évoqués par certains participants. D’un autre côté, les experts de VITO ont indiqué qu’il existe très peu d’études scientifiques sur le sujet. L’impact des PUF sur la santé, lié au trafic routier, n’est pas prouvé et d’autant moins lorsque les PUF sont liées au trafic aérien. Il a été suggéré que le principe de précaution soit appliqué dans ces cas-là. Les experts de Tractebel ont insisté sur le fait que les émissions de PUF vont diminuer au cours des prochaines années, notamment grâce à l’évolution technologique des moteurs des voitures.
- Il a été souligné qu’à Schiphol, les mesures de référence étaient prises à 40 kilomètres de l’aéroport. On a dès lors regretté qu’à Brussels Airport, les mesures ne soient prises qu’à 7 km de l’aéroport, où les particules fines sont encore très présentes. VITO a répondu que ces mesures ne sont pas prises comme référence mais simplement pour avoir différentes mesures afin de pouvoir différencier ce qui est lié au pic et à la moyenne.
- Il a été mentionné que des mesures similaires prises à 7 kilomètres de l’aéroport de Schiphol ont révélé des concentrations en PUF bien plus élevées qu’autour de Brussels Airport. Selon les experts, une étude à plus long terme est en cours à Schiphol, à laquelle participe également VITO. Pour eux, il est essentiel que les différentes régions aéroportuaires qui sont confrontées aux mêmes problématiques de qualité de l’air partagent les résultats de leurs études.
- La question a été posée de savoir s’il est possible que les émissions de PUF mesurées pouvaient être liées, par exemple, au fait que les avions sortent généralement leur train d’atterrissage à des endroits spécifiques. Il a été répondu que la sortie du train d’atterrissage peut générer des émissions supplémentaires dans le cas où l’avion doit remettre de la puissance afin de ne pas ralentir davantage. Brussels Airport Company veut donc inciter encore plus les compagnies aériennes à sortir le train d’atterrissage le plus tardivement possible.
- Il a été demandé si l’augmentation très significative des avions qui décolleront de la 25L n’aura pas un impact sur la qualité de l’air à Zaventem. L’expert de VITO a expliqué que les PUF ne retombent pas au sol car elles sont ultrafines et sont emportées par le vent.
- L’une des participantes a demandé si les PUF avaient un impact sur les jardins et les potagers des communes riveraines de l’aéroport. Selon les experts, ce n’est pas le cas car les PUF se comportent comme un gaz. Autrement dit, ces particules restent dans l’air mais ne se déposent pas sur le sol.
- Une autre participante s’est inquiétée de savoir si le fait que les mesures de PUF avaient été réalisées en octobre et novembre, qui sont des mois où il y a beaucoup de vent, n’avait pas faussé les résultats. Selon les experts, le fait d’avoir mesuré sur deux mois permet d’avoir des résultats suffisamment représentatifs.
- L’une des participantes a regretté que la Vision stratégique ne parle pas davantage de la pollution générée par le trafic automobile, qui est bien plus impactante que celle générée par les avions. Selon l’expert de Tractebel, la hausse du trafic automobile a bel et bien été prise en compte dans les calculs.
- Lors de la discussion, il est apparu également que les études faites sur la qualité de l’air se sont basées sur des scénarios très prudents. Elles n’ont que peu tenu compte, par exemple, des effets positifs liés à l’utilisation de biocarburants (qui devrait augmenter à l’avenir) et elles n’ont pas tenu compte non plus de l’impact positif du « taxiing » électrique et d’autres nouvelles technologies.
Suggestions pour Brussels Airport Company
- Plusieurs participants ont demandé aux experts et à Brussels Airport Company de réaliser des mesures de qualité de l’air sur une plus longue période, comme c’est déjà le cas à Schiphol, mais aussi sur une zone géographique plus grande.
- Plusieurs participants ont demandé également que l’on combine mesures et modélisation, afin de pouvoir aboutir à des résultats encore plus représentatifs.
- Il a été demandé que l’étude de VITO soit étendue et que le trajet de la 25L soit également pris en compte. Il a également été demandé que des mesures de référence soient prises en compte, plus loin qu’à 7 kilomètres de distance de l’aéroport.
- Plusieurs participants ont suggéré de demander à des universités flamandes d’étudier les effets des PUF sur la santé afin de pouvoir avoir des points de référence.
- Il a été suggéré d’examiner les résultats de mesure de la semaine suivant le 22 mars 2016 afin de vérifier quels sont les grands impacts de l’aéroport en-dehors des particules ultrafines.
Suggestions et réflexions concernant le bruit au sol
Différents participants ont émis des remarques sur les bases, très conservatives, des calculs de la KU Leuven :
- Il a été demandé à l’expert de la KU Leuven pourquoi celui-ci avait affirmé lors de sa présentation qu’il s’était basé sur un « worst case scenario ». L’expert a répondu qu’il s’était effectivement basé sur des critères de calcul extrêmement prudents. Deux exemples : la réduction de bruit attendue des moteurs d’avions de nouvelle génération et le « taxiing » électrique n’ont pas été pris en compte.
- D’autres participants se sont étonnés que l’étude de la KU Leuven ne prenne pas en compte les évolutions/innovations qui concernent les moteurs d’avions par exemple. L’expert a répondu que l’impact des évolutions, qui se font au fil des années, est difficile à prévoir. C’est pourquoi il a préféré opter pour un scénario prudent. Un participant a également confirmé que les évolutions technologiques se font au fil des années et non de manière abrupte.
- On a cité l’exemple des avions qui, lorsqu’ils font du « taxiing » vers les jetées, n’utilisent souvent qu’un seul moteur. Cela permet de diminuer le bruit au sol et la consommation de carburant.
- Il a été mentionné que lorsqu’on entrera dans une phase d’étude plus précise, il faudra prendra en compte la réalité qui aura sans doute évolué d’ici là, grâce aux avancées technologiques.
D’autres participants ont exprimé des remarques sur les éléments pris en compte pour réaliser l’étude :
- L’un des participants a regretté que l’étude de la KU Leuven se soit limitée à montrer un contour de bruit au sol sur base d’une limite de 50 dB. Selon ce participant, des études récentes indiquent que le bruit aurait déjà un impact sur la santé à partir de 40 dB et que cela entraînerait notamment des problèmes d’apprentissage chez les enfants. Ce à quoi l’expert de la KU Leuven a répondu qu’il n’était pas compétent pour se prononcer sur les questions concernant la santé.
- Un autre participant a fait remarquer qu’il était étonnant que les différentes études d’impact sur le bruit, que ce soit le bruit aérien ou le bruit au sol, tiennent toujours compte d’une nuit qui dure jusqu’à 7 heures du matin, alors que les limitations pour le nombre de mouvements nocturnes à Brussels Airport s’arrêtent à 6 heures du matin. Selon ce participant, l’impact de cette heure située entre 6 heures et 7 heures du matin, durant laquelle il y a beaucoup de décollages et donc beaucoup de bruit au sol, est atténuée dans les chiffres présentés par la KU Leuven. Selon l’expert, cette heure est pourtant bien visible dans les résultats de son étude.
- Des participants se sont demandés s’il ne serait pas possible de prendre des mesures additionnelles pour réduire le bruit au sol, notamment en utilisant de l’asphalte moins bruyant ou en ajoutant des plantations près des jetées et des bâtiments de l’aéroport. Mais selon l’expert de la KU Leuven, l’impact de ce type de mesures serait minime.
- L’un des participants demande s’il ne serait pas plus judicieux de publier des chiffres combinant les impacts du bruit au sol et du bruit aérien. Mais pour l’expert, une telle combinaison n’aurait pas d’intérêt car il s’agit de deux bruits trop différents.
Différents participants ont regretté que l’étude ne présente que des moyennes. Or, ce sont les pics qui ont un impact important sur la qualité de la vie des gens. D’autres participants rejoignent ce point de vue. Un participant a insisté aussi sur le fait que l’impact du bruit est différent s’il a lieu pendant les heures de travail ou à une heure où les personnes souhaitent se reposer.
- Un représentant de Brussels Airport a dit comprendre que les mesures peuvent susciter de nombreuses questions. D’autant que, pour le moment, il s’agit d’une vision et non d’un plan concret. Il est cependant important, pour l’aéroport, de mesurer l’impact éventuel de sa vision, en tenant compte de la réalité actuelle. Un riverain a souligné que l’initiative prise par Brussels Airport Company reste très intéressante. Il souhaiterait que les études menées prennent en compte, de manière spécifique, les moments de pics et les créneaux horaires entre 6 et 7h du matin, afin que les résultats présentés rejoignent au mieux la réalité des riverains.
Suggestions pour Brussels Airport Company
- Comme ce fut demandé pour le bruit aérien, plusieurs participants ont demandé s’il serait possible d’avoir des études qui montrent l’impact du bruit au sol lors des pics et entre 6 et 7h du matin.
Suggestions et réflexions concernant l’aménagement du territoire
Un représentant de Brussels Airport Company a insisté sur le fait qu’une politique de l’aménagement du territoire fait toujours défaut. Aucune action n’a été prise en ce sens. Ce représentant s’est étonné, comme d’autres participants, que des maisons soient encore construites à seulement quelques centaines de mètres des pistes, alors que des avions décollent toutes les deux minutes. Un bourgmestre a insisté sur le fait qu’il informe les futurs riverains de cette situation mais que la décision doit venir de la Région flamande. L’ensemble des participants était d’accord sur l’importance d’avoir un cadre stable qui puisse permettre une politique d’aménagement du territoire claire.
- L’un des participants a demandé si les murs anti-bruit feraient toujours 18 mètres de haut. Ce à quoi l’expert d’Arcadis a répondu que cela dépendait du relief du terrain. Du côté sud, par exemple, les murs ne feraient que 8 mètres de haut en moyenne.
- Un participant a manifesté son intérêt pour qu’un mur anti-bruit soit également construit du côté de Zaventem.
- Plusieurs participants ont demandé pourquoi l’étude d’Arcadis se basait sur des murs anti-bruit tout droits à l’intérieur et en pente à l’extérieur, alors que jusqu’ici, l’option inverse avait été retenue pour certains murs anti-bruit déjà construits (notamment à Steenokkerzeel). Selon l’expert d’Arcadis, tous les types de murs anti-bruit sont possibles, mais la formule avec la pente vers l’extérieur s’intègre souvent mieux dans le paysage et donne moins un effet ‘mur de Berlin’ ou ‘mur à la frontière mexicaine’.
- Un représentant de Brussels Aiport Company a insisté sur le fait que différentes formules peuvent être développées.
- A la demande d’un participant concernant l’impact du mur anti-bruit existant à Steenokkerzeel, un représentant de Brussels Airport a répondu que le bruit au sol a réellement diminué pour les riverains.
- L’une des participantes s’est inquiétée de l’impact des options envisagées sur les terres agricoles. Elle souligne qu’une partie de ces terres, qui sont pourtant considérées comme stratégiques par la Province du Brabant Flamand, risque d’être coupée de la terre agricole au sud si on retient l’option B. Elle demande donc que l’impact sur les terres agricoles soit bien cartographié, avec aussi une mini étude d’incidences. Un autre participant a souligné que la question des compensations qui seront accordées aux agriculteurs devra tenir compte de ces impacts, si on ne veut pas que ces entreprises agricoles soient obligées de mettre la clé sous le paillasson. Selon l’expert, un cadre juridique devra être créé.
Un participant a insisté sur le fait que la viabilité du territoire autour de l’aéroport devrait être mieux prise en compte. Il trouve que cet élément manque dans les études présentées. Les chiffres spécifiques montrent que 22 maisons seront directement impactées. C’est un impact très limité. Par contre, l’utilisation du terrain aura un impact plus important sur la viabilité des quartiers autour de l’aéroport. Un riverain a mentionné par exemple l’impact du mur anti-bruit sur la qualité de vie de certains quartiers.
Selon plusieurs participants, une des solutions pour limiter l’impact du bruit au sol est d’investir dans l’isolation des maisons. Mais ce n’est pas la panacée puisqu’en été, les habitants aiment sortir dans leur jardin, ont fait remarquer différents intervenants. Un participant a également fait remarquer que des fonds pour isoler les maisons sont/seront disponibles pour les maisons qui sont situées tout près de l’aéroport. Par contre, ils ne seront pas disponibles dans les communes qui sont plus loin de l’aéroport mais qui subissent également des nuisances sonores.
Un participant a émis des réserves quant à la définition de « valeur patrimoniale » et a fait valoir qu’avec une définition différente, plus de bâtiments pourraient être considérés comme touchés. L’expert a expliqué que la définition utilisée tenait compte du décret flamand existant.
Suggestions pour Brussels Airport Company
- Pourquoi ne pas utiliser les talus des murs anti-bruit pour faire des choses utiles ? Parmi les pistes proposées : des vignobles, des halls de sport, des circuits de VTT,…
- Un participant a demandé que l’aspect viabilité soit davantage étudié et pris en compte pour ceux dont la maison n’est pas impactée par la prolongation ou l’installation d’un mur anti-bruit, mais qui habitent dans les environnements immédiats.
- L’une des participantes a demandé si l’intégralité du rapport d’Arcadis pouvait être rendue disponible pour les membres du Forum 2040.
- Un participant a demandé s’il était possible d’inviter quelqu’un ayant fait des recherches sur ce thème autour des aéroports de Liège et/ou Charleroi.
- Un autre participant a demandé s’il était possible d’installer une barrière anti-bruit le long de la Felix Timmermanslaan à Diegem.
- Une demande a également été exprimée en faveur d’un mur anti-bruit à Zaventem (centre).